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Fouilles du sites alban : AJACCIO apres ADJACIUM

Fouilles du sites alban : AJACCIO après ADJACIUM

Apres les fouilles archéologiques effectuées sur le site Alban, la cité impériale effectue un plongeon vertigineux dans un passé qui ne la rajeunit pas. En ces temps de romanité ambiante et de christianisme en plein essor, Ajaccio et la Corse baignaient dans un climat de brassage méditerranéen porteur de toutes les influences.

La Corse fille de l’antiquité
et de la chrétienté.
Magnifique creuset de civilisation antique et chrétienne, la Corse, terre de christianisme précoce possède dans le tréfonds de son âme le souci des gloires passées.
Psychologique, humain, patronymique et génétiquement ressenti, cet héritage est fondé sur la volonté de respecter les valeurs se rattachant à cet idéal lointain. Sur l’île, l’antiquité est beaucoup moins loin que partout ailleurs dans le monde. Elle procède toujours du vécu quotidien depuis l’assurance virile des hommes, leur courage, leur sens de l’honneur jusqu’à la vertu des femmes ainsi qu’a l’importance de la cellule familiale et son extension clanique.Le monde latin constitue jusqu’à nos jours le premier substrat de la «civilisation corse».
Kallisté, ces criques, plages ou refuges offraient aux peuplades méditerranéennes, un site géostratégique d’exception, recherché aussi bien par les marchands grecs que par les soldats romains. Phéniciens, Grecs, Romains, Barbares, Pisans, Aragonais, Génois, Français. La liste des peuples et des puissances qui, au fil de l’histoire se sont intéressés à la Corse donne le vertige. Passage obligé et croisement de toutes les routes commerciales de la Méditerranée, Kyrnos baigne au milieu du grand lac salé, le fameux «mare nostrum» romain.
Tournée vers le dehors, l’île développe son économie sur la périphérie littorale.
Au premier siècle de notre ère, Pline l’Ancien parlera de 32 villes et des 2 colonies d’Aleria et de Mariana, tandis qu’un siècle plus tard, Ptolémée dressera une des premieres cartes de l’însularité et citera 21 cités proches de la mer ainsi que 4 ports.
Simples mouillages ou centres commerciaux actifs, la rareté des vestiges n’autorise guère un tableau précis. Il existait probablement un établissement à Ajaccio que des sources ancienne nomment le «bon port» en raison de la qualité de son site et de la protection de son golfe. Les témoignages de Strabon, Sénèque et Diodore de Sicile qui évoquent la Corse lèvent à peine le voile de l’opacité antique.
La Corse romaine a périclité en même temps que l’empire lui-même. Les ports s’ensablent, la malaria s’installe et les populations se réfugient en altitude. C’est le début d’une régression de 15 siècles pour les régions côtières. Le relais culturel de Rome a été progressivement assuré par la chrétienté. On fait remonter au 3 Siècle les origines du christianisme en Corse et celle-ci eut ses martyrs qui furent plus tard l’objet d’une piété populaire, qu’il s’agisse de Sainte Dévote, Sainte Julie ou Sainte Restitude. L’intérieur fut plus tardivement touché et le paganisme y était dominant jusqu’à l’action missionnaire initiée par le Pape Grégoire le Grand aux alentours du 6° siècle. Les 5 siéges épiscopaux qui constituent après l’effondrement de l’empire romain la seule structure institutionnelle se trouvent tous dans la zone littorale, à Ajaccio, Aleria, Mariana, Nebbio et Sagone. La basilique paléochrétienne (4° siècle) de Mariana et le baptistère découvert récemment à Ajaccio témoignent des prémices, de l’intensité et de l’implantation d’une activité cultuelle en plein essor.
Déposés par la grande houle de l’histoire, les sédiments durables d’une langue, d’une culture et d’une foi sont désormais en place en cette fin du 5° siècle pour parvenir jusqu’à nous quelques 1500 ans plus tard et constituer ainsi un fil d’Ariane généalogique et un cordon ombilical identitaire.

Un antique monde
«paleoajaccien».
Ajaccio telle que nous la connaissons est issue d’initiatives génoise avec l’implantation de 100 familles ligures en 1492 dans ce que nous nommons aujourd’hui la vielle ville ou le «carrughju». Les chroniques plus anciennes s’éparpillent davantage et attribuent à la cité ajacciene diverses origines qui ont le mérite d’arrimer la fondation de la ville très loin dans le temps. Filiation mythique émanant de l’Illiade dont l’un de ses héros, Ajax, serait l’illustre père fondateur, ou bien filiation latine due à l’étymologie du nom Ajaccio relié à Adjectio aggeri (embranchement de voies) Urcinium (fabrication de cruches) et Agghiacciu (parc à moutons), quelles que soient les circonstances qui ont présidé à sa naissance, la ville est certainement antique : au 7° siècle, le Pape Grégoire le Grand à qui l’on doit notre calendrier dit «grégorien», cite plusieurs fois Adjacium dans ses lettres. Depuis lors, les écrits de Mérimée, la découverte d’une voûte en brique contenant 2 jarres funéraires en terre cuite et l’exhumation du sarcophage du «bon pasteur» en 1938 dans le quartier de Saint Jean sont venu corroborer la thèse d’une implantation ancestrale d’un peuplement humain dans le fond du golfe. Les récentes découvertes archéologiques sur le site Alban viennent à point nommé pour étayer ce que certains historiens subodoraient depuis quelques temps. Ces fouilles, mettant à jour 3 phases d’occupation des lieux sont peut être l’unique occasion de trouver les véritables origines d’Ajaccio. Placées sous l’égide de l’INRAP (institut national de recherche archéologique préventive) auquel l’aménageur du terrain a fait appel, les travaux menés par une équipes de spécialistes en archéologie et anthropologie permettent d’actionner la machine à remonter le temps pour un fabuleux voyage au cœur de l’antiquité romaine et paléochrétienne

Du 1°au 4° siècle : une présence romaine trahie par sa quotidienneté.
Une présence romaine durant les 4 premiers siècles de notre ère est attestée par la mise en exergue de structures négatives, sortes d’empreintes laissées par la quotidienneté d’une population donnée : trous de poteaux et pores dépotoirs c’est à dire de grosses poubelles contenant des fragments d’amphores et de céramiques se nichant dans les cavités naturelles et anfractuosités du terrain. L’amphore, objet symbolique et multi usages de l’antiquité se retrouve aux 4 coins de la méditerranée et servait au transport de marchandises diverses, huiles, vins, poissons séchés.
5°siècle : un baptistère paleochretien qui cache une cathédrale.
Très tôt évangélisées, l’Afrique du nord et Carthage sont reliées politiquement à la Corse selon le découpage administratif romain. En 484, suite à la déferlante Vandale de confession Arienne sur le nord de continent africain, tous les évêques catholiques sont exiles en Corse et en Sardaigne. Ce fait historique avéré serait à l’origine de la découverte majeure des fouilles du site Alban. Un baptistère daté du 5° siècle dont la céramique n’a pas encore été étudiée se presente sous la forme d’un monument en plan tréflé. L’ensemble est composé d’une grande abside et d’une cuve baptismale en son centre, cruciforme, de 1,34 M de profondeur, et de 2,69 X 1,5 m de dimension. Très bien conservé il a subi au cours du temps une dizaine de modifications dont une surévaluation du fond et une réduction du volume de la cuve ainsi que l’adjonction d’une cuve cylindrique de 0,8 m de diamètre et de 0,28m de profondeur munie d’un système d’évacuation des eaux. Selon un rite sûrement identique au rite africain , les baptêmes étaient effectués une fois l’an à la veille de pâques. L’évêque officiant sur la cité épiscopale ajaccienne possédait seul le privilège d’accomplissement de l’acte baptismal.
Ajaccio, siége de l’évêché, cache certainement une cathédrale contiguë au baptistère comme cela était la règle à l’époque.

6°siècle moyen age : une nécropole a la typologie variée.
Les nombreux curieux qui s’agglutinaient autour du site Alban durant les travaux de décapage intégral de la parcelle 102 n’ont pas manqué d’être stupéfaits à la vue de squelettes parfaitement conservés gisant au fond de nombreuses tombes. Une nécropole de 81 tombes à la typologie variée a été découverte autour du baptistère. Tombes simples en terre, tombes rupestres, tombes anthropomorphiques avec logettes céphaliques, tombes sous tuiles, tombes de diverses formes quadrangulaires ou triangulaires, tombes en amphores contenant des corps d’enfants ou bien tombes en coffres de pierre avec dalle de granit, toutes sont le témoignage d’époques et d’influences culturelles et familiales s’étalant depuis le 6°siècle jusqu’au moyen age.

San Ghjuvan Battista d’ Aiacciu a obligatoirement d’autres enseignements à nous donner.
L’équipe de Daniel Istria, l’archéologue de l’INRAP responsable des fouilles, s’attèle à faire parler les objets découverts in situ. Les augustes ascendances de la fière cité ajaccienne sont peut être le prélude à de nouvelles découvertes qui ancreraient un peu plus la ville dans une tradition épousant les origines de notre ère.

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